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Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838.

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"veux construire le nouveau batiment dont je
"vous ai parle." -- Puis il brisa le cachet,
sans toutefois interrompre la conversation qui
roulait sur les avantages de la fortune. -- "Ce-
"lui qui ne possede pas au moins un million,
"dit-il, n'est, (pardonnez-moi le mot), n'est
"qu'un gueux" -- "Quelle verite ! m'ecriai-je
"avec l'accent d'une douloureuse conviction."
L'expression de ma voix le fit sourire: il se
tourna vers moi -- "Restez, mon ami, me dit-
"il, peut-etre, plus tard, aurai-je le temps de
"vous dire ce que je pense de votre affaire."
Il mit dans sa poche la lettre qu'il avait par-
courue des yeux, et offrit le bras a une jeune
dame. Le reste de la societe l'imita; chacun
s'empressa aupres de la beaute qui l'interessait.
Les groupes se formerent et on s'achemina vers
la colline emaillee de fleurs, que M. John avait
designee.

Pour moi, je fermais la marche, sans etre
a charge a personne, car personne ne faisait
attention a moi. Tour-a-tour on folatrait, on
parlait arec gravite de choses vaines et futiles;
on traitait avec legerete les sujets les plus gra-
ves, et l'epigramme s'aiguisait, surtout aux de-

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«veux construire le nouveau bâtiment dont je
«vous ai parlé.» — Puis il brisa le cachet,
sans toutefois interrompre la conversation qui
roulait sur les avantages de la fortune. — «Ce-
«lui qui ne possède pas au moins un million,
«dit-il, n’est, (pardonnez-moi le mot), n’est
«qu’un gueux» — «Quelle vérité ! m’écriai-je
«avec l’accent d’une douloureuse conviction.»
L’expression de ma voix le fit sourire: il se
tourna vers moi — «Restez, mon ami, me dit-
«il, peut-être, plus tard, aurai-je le temps de
«vous dire ce que je pense de votre affaire.»
Il mit dans sa poche la lettre qu’il avait par-
courue des yeux, et offrit le bras à une jeune
dame. Le reste de la société l’imita; chacun
s’empressa auprès de la beauté qui l’intéressait.
Les groupes se formèrent et on s’achemina vers
la colline émaillée de fleurs, que M. John avait
désignée.

Pour moi, je fermais la marche, sans être
à charge à personne, car personne ne faisait
attention à moi. Tour-à-tour on folâtrait, on
parlait arec gravité de choses vaines et futiles;
on traitait avec légèreté les sujets les plus gra-
ves, et l’épigramme s’aiguisait, surtout aux dé-

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[3/0019] «veux construire le nouveau bâtiment dont je «vous ai parlé.» — Puis il brisa le cachet, sans toutefois interrompre la conversation qui roulait sur les avantages de la fortune. — «Ce- «lui qui ne possède pas au moins un million, «dit-il, n’est, (pardonnez-moi le mot), n’est «qu’un gueux» — «Quelle vérité ! m’écriai-je «avec l’accent d’une douloureuse conviction.» L’expression de ma voix le fit sourire: il se tourna vers moi — «Restez, mon ami, me dit- «il, peut-être, plus tard, aurai-je le temps de «vous dire ce que je pense de votre affaire.» Il mit dans sa poche la lettre qu’il avait par- courue des yeux, et offrit le bras à une jeune dame. Le reste de la société l’imita; chacun s’empressa auprès de la beauté qui l’intéressait. Les groupes se formèrent et on s’achemina vers la colline émaillée de fleurs, que M. John avait désignée. Pour moi, je fermais la marche, sans être à charge à personne, car personne ne faisait attention à moi. Tour-à-tour on folâtrait, on parlait arec gravité de choses vaines et futiles; on traitait avec légèreté les sujets les plus gra- ves, et l’épigramme s’aiguisait, surtout aux dé- *

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Zitationshilfe: Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838, S. 3. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/19>, abgerufen am 21.11.2024.