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Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838.

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femmes manifestaient la compassion que je leur
inspirais, et l'expression de ce sentiment ne me
dechirait pas moins le coeur, que les outrages
de la jeunesse et l'orgueilleux mepris des hom-
mes, de ceux-la surtout qui se complaisaient a
l'aspect de l'ombre large et respectable dont
leur haute stature etait accompagnee. Une jeune
personne d'une grande beaute, qui semblait sui-
vre ses parens, tandis que ceux-ci regardaient
avec circonspection a leurs pieds, porta par ha-
sard ses regards sur moi, je la vis tressaillir
lorsqu'elle remarqua la malheureuse clarte qui
m'environnait. L'effroi se peignit sur son beau
visage, elle le couvrit de son voile, baissa la
tete, et poursuivit sa route sans ouvrir la bou-
che. Des larmes ameres s'echapperent alors de
mes yeux, et le coeur brise, je me replongeai
dans l'ombre. J'eus besoin de m'appuyer contre
les murs pour soutenir ma demarche chancelante,
et je regagnai lentement ma maison, ou je ren-
trai tard.

Le sommeil n'approcha point, cette nuit, de
ma paupiere. Mon premier soin, des que le jour
parut, fut de faire chercher l'homme en habit
gris. J'esperais, si je parvenais a le retrouver,

femmes manifestaient la compassion que je leur
inspirais, et l’expression de ce sentiment ne me
déchirait pas moins le coeur, que les outrages
de la jeunesse et l’orgueilleux mépris des hom-
mes, de ceux-là surtout qui se complaisaient à
l’aspect de l’ombre large et respectable dont
leur haute stature était accompagnée. Une jeune
personne d’une grande beauté, qui semblait sui-
vre ses parens, tandis que ceux-ci regardaient
avec circonspection à leurs pieds, porta par ha-
sard ses regards sur moi, je la vis tressaillir
lorsqu’elle remarqua la malheureuse clarté qui
m’environnait. L’effroi se peignit sur son beau
visage, elle le couvrit de son voile, baissa la
tête, et poursuivit sa route sans ouvrir la bou-
che. Des larmes amères s’échappèrent alors de
mes yeux, et le coeur brisé, je me replongeai
dans l’ombre. J’eus besoin de m’appuyer contre
les murs pour soutenir ma démarche chancelante,
et je regagnai lentement ma maison, où je ren-
trai tard.

Le sommeil n’approcha point, cette nuit, de
ma paupière. Mon premier soin, dès que le jour
parut, fut de faire chercher l’homme en habit
gris. J’espérais, si je parvenais à le retrouver,

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[20/0038] femmes manifestaient la compassion que je leur inspirais, et l’expression de ce sentiment ne me déchirait pas moins le coeur, que les outrages de la jeunesse et l’orgueilleux mépris des hom- mes, de ceux-là surtout qui se complaisaient à l’aspect de l’ombre large et respectable dont leur haute stature était accompagnée. Une jeune personne d’une grande beauté, qui semblait sui- vre ses parens, tandis que ceux-ci regardaient avec circonspection à leurs pieds, porta par ha- sard ses regards sur moi, je la vis tressaillir lorsqu’elle remarqua la malheureuse clarté qui m’environnait. L’effroi se peignit sur son beau visage, elle le couvrit de son voile, baissa la tête, et poursuivit sa route sans ouvrir la bou- che. Des larmes amères s’échappèrent alors de mes yeux, et le coeur brisé, je me replongeai dans l’ombre. J’eus besoin de m’appuyer contre les murs pour soutenir ma démarche chancelante, et je regagnai lentement ma maison, où je ren- trai tard. Le sommeil n’approcha point, cette nuit, de ma paupière. Mon premier soin, dès que le jour parut, fut de faire chercher l’homme en habit gris. J’espérais, si je parvenais à le retrouver,

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Zitationshilfe: Chamisso, Adelbert von: MERVEILLEUSE HISTOIRE DE PIERRE SCHLÉMIHL. Paris, 1838, S. 20. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/19_ZZ_2786/38>, abgerufen am 21.11.2024.