Il en est autrement des questions qui concernent directement la Russie.
Tel est nommement le cas des affaires de la Pologne et de la Turquie.
Assurement, l'attitude adoptee alors par nos allies leur a ete fortement conseille par leur propre interet, car leur cause se trouvait liee a la notre et le triomphe de l'insurrection a Varsovie aurait porte un coup sensible a l'au- torite de la Prusse en Posnanie comme a celle de l'Autriche dans la Gallicie.
Mais cette consideration quelque juste qu'elle soit ne doit pas nous faire perdre de vue les obligations reelles que nous devons a nos Allies. Car eux, de leur cote avaient des risques a courir en nous soutenant dans notre lutte, le secours qu'ils nous pretaient les compromettait evidemment envers nos adversaires politiques en Angleterre et en France.
La fidelite que les cours de Vienne et de Berlin nous ont prouvee a cette epoque merite d'autant plus d'etre appreciee que nous possedons le secret de leur faiblesse!
16) Premierement: "ne comptons-nous pas la force de nos Allies pour moins qu'elle ne pese reellement dans la balance de nos interets?" --
En effet, pour etre completement dans le vrai convenons que depuis huit ans la Russie, au milieu de circonstances tres-difficiles, n'est parvenu a main- tenir la paix generale que parce qu'elle a reussi a opposer le systeme conser- vateur de la triple alliance aux efforts reunis des deux cours maritimes. Tant que l'Autriche et la Prusse seront pour nous, ce simple fait arretera les projets ambitieux de la France et deconcertera les dessins malveillants de l'Angleterre.
Toutes les deux, il faut le dire, croient l'union des puissances continentales plus forte qu'elle ne l'est en realite, et ce prestige a sauve l'Europe d'une commotion generale.
La Prusse, de son cote renferme en elle des dangers de discorde et d'agitation interieure. Les questions religieuses qui se rattachent a la destitution recente de l'archeveque de Cologne contribuent a donner a ces germes de des- union civile et morale un facheux developpement.
Le triomphe des idees revolutionnaires sur les bords du Danube et de l'Oder nous regarderait de bien plus pres que le bill de reforme et les barricades de Juillet. Voila pourquoi nous devons considerer la cause de la royaute en Prusse et en Autriche comme une cause qui ne nous est pas etrangere, mais comme une question qui concerne directement la Russie. C'est la ce qui explique le prix reel que nous devons attacher a nos Alliances, parceque leur interet et le notre ne font moralement qu'un.
Secondement: Ne demandons pas a nos Allies plus que leur amitie n'est en etat de tenir.
Il y a deux choses surtout que nous ne devons pas attendre de nos Allies. 1° Nous ne devons pas leur demander, dans leurs relations directes avec la France un degre de courage moral qui est toujours l'effet de la force et qui consequemment ne saurait resider ni a Berlin, ni a Vienne.
2° Une autre regle de conduite que nous devons observer dans nos relations avec nos Allies pour ne pas nous exposer a un mecompte regrettable, c'est qu'il ne faut attendre d'eux aucune cooperation active s'il survenait quelque com- plication entre nous et les puissances maritimes a l'egard des affaires d'Orient.
Sous ce rapport les intentions de la Cour de Berlin nous sont connues. Aussi l'Empereur ne lui demande rien au dela de ce qu'il est equitable d'en attendre.
XXIX. Europäiſche Politik des Czaren Nikolaus.
Il en est autrement des questions qui concernent directement la Russie.
Tel est nommément le cas des affaires de la Pologne et de la Turquie.
Assurément, l’attitude adoptée alors par nos alliés leur a été fortement conseillé par leur propre intérêt, car leur cause se trouvait liée à la notre et le triomphe de l’insurrection à Varsovie aurait porté un coup sensible à l’au- torité de la Prusse en Posnanie comme à celle de l’Autriche dans la Gallicie.
Mais cette considération quelque juste qu’elle soit ne doit pas nous faire perdre de vue les obligations réelles que nous devons à nos Alliés. Car eux, de leur côté avaient des risques à courir en nous soutenant dans notre lutte, le secours qu’ils nous prêtaient les compromettait évidemment envers nos adversaires politiques en Angleterre et en France.
La fidélité que les cours de Vienne et de Berlin nous ont prouvée à cette époque mérite d’autant plus d’être appréciée que nous possédons le secret de leur faiblesse!
16) Premièrement: „ne comptons-nous pas la force de nos Alliés pour moins qu’elle ne pèse réellement dans la balance de nos intérêts?“ —
En effet, pour être complètement dans le vrai convenons que depuis huit ans la Russie, au milieu de circonstances très-difficiles, n’est parvenu à main- tenir la paix générale que parce qu’elle a réussi à opposer le système conser- vateur de la triple alliance aux efforts réunis des deux cours maritimes. Tant que l’Autriche et la Prusse seront pour nous, ce simple fait arrêtera les projets ambitieux de la France et déconcertera les dessins malveillants de l’Angleterre.
Toutes les deux, il faut le dire, croient l’union des puissances continentales plus forte qu’elle ne l’est en réalité, et ce prestige a sauvé l’Europe d’une commotion générale.
La Prusse, de son côté renferme en elle des dangers de discorde et d’agitation intérieure. Les questions religieuses qui se rattachent à la destitution récente de l’archevêque de Cologne contribuent à donner à ces germes de dés- union civile et morale un fâcheux développement.
Le triomphe des idées révolutionnaires sur les bords du Danube et de l’Oder nous regarderait de bien plus près que le bill de réforme et les barricades de Juillet. Voilà pourquoi nous devons considérer la cause de la royauté en Prusse et en Autriche comme une cause qui ne nous est pas étrangère, mais comme une question qui concerne directement la Russie. C’est là ce qui explique le prix réel que nous devons attacher à nos Alliances, parceque leur intérêt et le nôtre ne font moralement qu’un.
Secondement: Ne demandons pas à nos Alliés plus que leur amitié n’est en état de tenir.
Il y a deux choses surtout que nous ne devons pas attendre de nos Alliés. 1° Nous ne devons pas leur demander, dans leurs relations directes avec la France un degré de courage moral qui est toujours l’effet de la force et qui conséquemment ne saurait résider ni à Berlin, ni à Vienne.
2° Une autre règle de conduite que nous devons observer dans nos relations avec nos Alliés pour ne pas nous exposer à un mécompte regrettable, c’est qu’il ne faut attendre d’eux aucune coopération active s’il survenait quelque com- plication entre nous et les puissances maritimes à l’égard des affaires d’Orient.
Sous ce rapport les intentions de la Cour de Berlin nous sont connues. Aussi l’Empereur ne lui demande rien au delà de ce qu’il est équitable d’en attendre.
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XXIX. Europäiſche Politik des Czaren Nikolaus.
Il en est autrement des questions qui concernent directement la Russie.
Tel est nommément le cas des affaires de la Pologne et de la Turquie.
Assurément, l’attitude adoptée alors par nos alliés leur a été fortement
conseillé par leur propre intérêt, car leur cause se trouvait liée à la notre et
le triomphe de l’insurrection à Varsovie aurait porté un coup sensible à l’au-
torité de la Prusse en Posnanie comme à celle de l’Autriche dans la Gallicie.
Mais cette considération quelque juste qu’elle soit ne doit pas nous faire
perdre de vue les obligations réelles que nous devons à nos Alliés. Car eux,
de leur côté avaient des risques à courir en nous soutenant dans notre lutte, le
secours qu’ils nous prêtaient les compromettait évidemment envers nos adversaires
politiques en Angleterre et en France.
La fidélité que les cours de Vienne et de Berlin nous ont prouvée à cette
époque mérite d’autant plus d’être appréciée que nous possédons le secret de
leur faiblesse!
16) Premièrement: „ne comptons-nous pas la force de nos Alliés pour
moins qu’elle ne pèse réellement dans la balance de nos intérêts?“ —
En effet, pour être complètement dans le vrai convenons que depuis huit
ans la Russie, au milieu de circonstances très-difficiles, n’est parvenu à main-
tenir la paix générale que parce qu’elle a réussi à opposer le système conser-
vateur de la triple alliance aux efforts réunis des deux cours maritimes. Tant
que l’Autriche et la Prusse seront pour nous, ce simple fait arrêtera les projets
ambitieux de la France et déconcertera les dessins malveillants de l’Angleterre.
Toutes les deux, il faut le dire, croient l’union des puissances continentales
plus forte qu’elle ne l’est en réalité, et ce prestige a sauvé l’Europe d’une
commotion générale.
La Prusse, de son côté renferme en elle des dangers de discorde et
d’agitation intérieure. Les questions religieuses qui se rattachent à la destitution
récente de l’archevêque de Cologne contribuent à donner à ces germes de dés-
union civile et morale un fâcheux développement.
Le triomphe des idées révolutionnaires sur les bords du Danube et de l’Oder
nous regarderait de bien plus près que le bill de réforme et les barricades de
Juillet. Voilà pourquoi nous devons considérer la cause de la royauté en Prusse
et en Autriche comme une cause qui ne nous est pas étrangère, mais comme
une question qui concerne directement la Russie. C’est là ce qui explique le
prix réel que nous devons attacher à nos Alliances, parceque leur intérêt et
le nôtre ne font moralement qu’un.
Secondement: Ne demandons pas à nos Alliés plus que leur
amitié n’est en état de tenir.
Il y a deux choses surtout que nous ne devons pas attendre de nos Alliés.
1° Nous ne devons pas leur demander, dans leurs relations directes avec la
France un degré de courage moral qui est toujours l’effet de la force et qui
conséquemment ne saurait résider ni à Berlin, ni à Vienne.
2° Une autre règle de conduite que nous devons observer dans nos relations
avec nos Alliés pour ne pas nous exposer à un mécompte regrettable, c’est qu’il
ne faut attendre d’eux aucune coopération active s’il survenait quelque com-
plication entre nous et les puissances maritimes à l’égard des affaires d’Orient.
Sous ce rapport les intentions de la Cour de Berlin nous sont connues.
Aussi l’Empereur ne lui demande rien au delà de ce qu’il est équitable d’en
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Treitschke, Heinrich von: Deutsche Geschichte im Neunzehnten Jahrhundert. Bd. 5: Bis zur März-Revolution. Leipzig, 1894, S. 762. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/treitschke_geschichte05_1894/776>, abgerufen am 27.11.2024.
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