C'est ainsi que Brutus, dans les champs Philippiques, Quand la Nuic deployoit ses voiles tenebreux, Tristement accable des affaires publiques, Crut voir un noir Demon, entendre un Spectre affreux, Qui lui vint annoncer son Destin malheureux.
Avouons, avouons sur tant d' experiences, Que l' Ame est incitee a tous ces jugemens, Quand des Esprits par leur vifs mouvemens, Des Sens interieurs emeuvent les puissances. Pourtant n' accusons point les Sens d' etre menteurs, Ni du vrai, ni du faux, ils ne sont les Auteurs; Ils sont maus simplement, & leurs raports nous rendent. Ce, que produit en eux l' Objet, dont ils dependent. Qu'ils fussent des portraits effrayans, ou flatteurs, C' est aux hommes alors a bien voir ce, qu'ils sentent; Et nos seuls Jugemens seront des Imposteurs, Si touchant un Objet, que nos Sens nous presentenr, Nous formons des Raisonnemens, Sur des vains Prejugez, & des faux fondemen[s].
Jugeons bien, jugeons mal, tout est dans notre tet[e.]
S[i]
Du Siege deſ Senſationſ.
C’eſt ainſi que Brutus, dans les champs Philippiques, Quand la Nuic déployoit ſes voiles tenebreux, Triſtement accablé des affaires publiques, Crut voir un noir Demon, entendre un Spectre affreux, Qui lui vint annoncer ſon Deſtin malheureux.
Avouons, avouons ſur tant d’ experiences, Que l’ Ame eſt incitée à tous ces jugemens, Quand des Eſprits par leur vifs mouvemens, Des Sens interieurs émeuvent les puiſſances. Pourtant n’ accuſons point les Sens d’ etre menteurs, Ni du vrai, ni du faux, ils ne ſont les Auteurs; Ils ſont mûs ſimplement, & leurs raports nous rendent. Ce, que produit en eux l’ Objet, dont ils dépendent. Qu’ils fuſſent des portraits effrayans, ou flatteurs, C’ eſt aux hommes alors à bien voir ce, qu’ils ſentent; Et nos ſeuls Jugemens ſeront des Impoſteurs, Si touchant un Objet, que nos Sens nous préſentenr, Nous formons des Raiſonnemens, Sur des vains Préjugez, & des faux fondemen[s].
Jugeons bien, jugeons mal, tout eſt dans notre tét[e.]
S[i]
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Du Siege deſ Senſationſ.
C’eſt ainſi que Brutus, dans les champs Philippiques,
Quand la Nuic déployoit ſes voiles tenebreux,
Triſtement accablé des affaires publiques,
Crut voir un noir Demon, entendre un Spectre affreux,
Qui lui vint annoncer ſon Deſtin malheureux.
Avouons, avouons ſur tant d’ experiences,
Que l’ Ame eſt incitée à tous ces jugemens,
Quand des Eſprits par leur vifs mouvemens,
Des Sens interieurs émeuvent les puiſſances.
Pourtant n’ accuſons point les Sens d’ etre menteurs,
Ni du vrai, ni du faux, ils ne ſont les Auteurs;
Ils ſont mûs ſimplement, & leurs raports nous rendent.
Ce, que produit en eux l’ Objet, dont ils dépendent.
Qu’ils fuſſent des portraits effrayans, ou flatteurs,
C’ eſt aux hommes alors à bien voir ce, qu’ils ſentent;
Et nos ſeuls Jugemens ſeront des Impoſteurs,
Si touchant un Objet, que nos Sens nous préſentenr,
Nous formons des Raiſonnemens,
Sur des vains Préjugez, & des faux fondemens.
Jugeons bien, jugeons mal, tout eſt dans notre téte.
Si
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Brockes, Barthold Heinrich: Herrn B. H. Brockes, [...] verdeutschte Grund-Sätze der Welt-Weisheit, des Herrn Abts Genest. Bd. 3. 2. Aufl. Hamburg, 1730, S. 518. In: Deutsches Textarchiv <https://www.deutschestextarchiv.de/brockes_vergnuegen03_1730/548>, abgerufen am 22.11.2024.
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